L'Hebdo CHR

Objectif ZERO DECHET: L’Interview de Claire

zéro dechet Lyon

Tout d’abord, présentez-vous !

Bonjour ! Je suis Claire, de l’Association Zéro Déchet Lyon. J’ai été au préalable bénévole dans l’association et pour une transition personnelle (changement de carrière), je suis devenue salariée en charge du plaidoyer notamment, depuis octobre 2019 dans l’association. 

  • Pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste l’objectif du mouvement « Zéro Déchet » et comment votre association contribue-t-elle à cette cause ?

La démarche zéro déchet vient tout d’abord de l’anglicisme « zero waste » (« pas de déchet / gaspillage »). C’est vraiment aller le plus possible vers le moins de gaspillage, le moins de déchets possible. Cela passe par plein de choses, que ce soit à l’échelle individuelle, collective, institutionnelle, il y a plein de niveaux sur lesquels nous pouvons agir.

En ce qui nous concerne, Zéro Déchet Lyon, nous sommes un groupe local du réseau « Zero Waste France », nous sommes une centaine de groupes locaux en France et à titre personnel, nous agissons sur la métropole de Lyon. L’idée est de sensibiliser les gens, les élus, les professionnels, au sujet de l’implication de tous dans la réduction de nos déchets, et pourquoi c’est important.

  • Aujourd’hui, nous allons nous concentrer sur le mouvement zéro déchet dans le contexte d’un restaurant. : Commençons par le début. Pourriez-vous nous expliquer ce qu’est le mouvement zéro déchet dans le contexte des restaurants ?

Il y a effectivement du gaspillage potentiel et de déchets dans chaque activité professionnelle ou personnelle et les restaurants ont leur propre marge de progrès dans la réduction de ces derniers.

Un des premiers gros leviers, c’est tout ce qui va être nourriture, donc au niveau des restes, que ce soit cuisiné ou pas : Qu’est-ce qu’on en fait derrière ?

Il y a plein de moyens potentiels d’agir au niveau des fournisseurs, tout ce qui concerne l’approvisionnement, mais aussi les déchets concernant la clientèle, lorsque l’on dresse la table avec la vaisselle et autres.

Les petites dépenses du quotidien ont également leur importance.

  • Quelles sont les principales actions et initiatives que votre association met en place pour sensibiliser les restaurateurs au zéro déchet et les encourager à adopter cette pratique ?

En ce qui nous concerne, nous parlons de réduction des déchets au sens très large. Beaucoup d’autres associations sont spécialisées dans l’anti-gaspillage alimentaire, comme Récup et Gamelles, avec qui nous travaillons en partenariat.

Nous sommes là pour mettre en avant et encourager une société zéro déchet, ce qui passe également par :

  • Encourager les professionnels, notamment la restauration,
  • Faire connaitre et promouvoir tout ce qui est compostage pour tout ce qui concerne les restes alimentaires.
  • Mais aussi tout ce qui va être emballage client ou fournisseur.

Il y a de plus en plus de solutions techniques qui existent sur le terrain pour les professionnels, et nous avons aussi ce rôle-là : faire connaître ces avancées.

Il y a également énormément de changement au niveau des lois, nous en voyons de plus en plus incitant à la réduction des déchets et du gaspillage, et nous sommes là pour faire connaitre cela, encourager les restaurateurs et leur montrer tous les gains que de telles pratiques comportent, car il y en a beaucoup, notamment économiques. 

Nous travaillons en partenariat avec la CMA (Chambre des Métiers et de l’Artisanat) qui propose des diagnostics pour les professionnels de la restauration. Afin de mettre en avant tout ce que leur coûte réellement les frais d’emballage client, et leur montrer que cela concerne environ 4% à 5% de leur chiffre d’affaires, ce qui est tout de même assez colossal. Sachant que plein de solutions assez faciles à mettre en place existent, une fois que nous avons les bons contacts et les bons liens, comme les emballages réutilisables par exemple.

Cela corrèle avec un projet mis en place au sein de notre association, qui s’appelle « mon commerce zéro déchet ». Ce dernier était initialement là pour mettre en avant les commerces qui jouaient le jeu et prenaient l’initiative d’accepter les contenants des clients extérieurs. Depuis quelques années, la loi AGEC (Anti-Gaspillage pour une Economie Circulaire) rend obligatoire le fait d’accepter les contenants des clients extérieurs.

L’idée est tout simplement de mettre en avant les commerces qui mettent en place ces pratiques zéro déchet. Nous avons un sticker symbolique ainsi qu’une cartographie qui répertorie tous les commerces zéro déchet, accessible au niveau France. Le but est de montrer les initiatives adoptées par ces commerces, comme accepter les contenants des gens, composter, proposer des produits vrac, participer à l’anti-gaspillage avec du don alimentaire, il y a de très nombreuses manières d’être référencé « mon commerce zéro déchet », et cela va du restaurateur au réparateur de chaussures.

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Pour faire court, tout le monde peut s’y mettre, et beaucoup d’actions facile à mmettre en place par n’importe quel professionnel existent. (L’association a d’ailleurs une liste de ces actions à disposition, si vous souhaitez en savoir plus).

  • Comment pouvez-vous aider les restaurants à mettre en place des initiatives de réduction des déchets et à adopter des pratiques durables ?

Comme mentionné, il y a tout ce qui est diagnostic au niveau des chambres consulaires, il ne faut surtout pas hésiter à aller demander, surtout en ce moment grâce au quartier zéro déchet Valmy dans le 9ème par exemple, où un accent est mis sur ces diagnostics, mais cela est valable sur tout le territoire même en Auvergne Rhône-Alpes.

Ces diagnostics sont gratuits et sont là pour aider les professionnels à identifier les postes de dépense les plus conséquents, et sont bien souvent fournis avec des solutions. Cela nécessite bien évidemment un investissement, mais de nombreux coups de pouce financiers existent en ce moment pour les professionnels. Alors n’hésitez plus à en profiter afin de changer ! Plein d’aides financières sont disponibles au niveau régional, et cela va de la chaudière au fournisseur, à la consigne pour les plats à emporter. Il faut vraiment les faire connaitre et ne pas craindre de se lancer et poser des questions. Nous sommes là pour aider à mettre en lien des acteurs du compostage actuellement sur le territoire, essayer de voir s’ils peuvent mutualiser ensemble.

  • Par exemple : Un restaurateur n’a pas le lieu pour composter, mais le restaurateur d’en face oui. En partageant les coûts d’enlèvement du compost, ces derniers sont assez vite réduits si l’on mutualise. Cela se fait d’ailleurs dans beaucoup de villes. Ce qui est intéressant c’est que nous nous inspirons nous-mêmes de restaurateurs, acteurs locaux sur le reste de la France, qui ont déjà sauté le pas.
  • Quels avantages pour les restaurateurs à adopter cette pratique ?

Il y en a énormément ! Même si au tout début ce n’est pas évident (autre raison pour laquelle les diagnostics sont intéressants. Récup et Gamelles fait des formations en interne dans les restaurants). C’est un investissement au long terme, car comme précisé précédemment, les lois ont beaucoup changé. Les emballages vont de plus en plus vers le réutilisable, le lavable, et il vaut mieux le faire maintenant que des aides sont disponibles pour se lancer, plutôt que d’être contraints et forcés après une date butoir, ce qui n’est jamais agréable.

Il y a des gains économiques qui ne sont pas forcément visibles dès le début, mais plutôt sur le moyen à long terme. Beaucoup de solutions techniques existent également : Si l’espace de stockage pour avoir des plats consignés est manquant, vous pouvez faire appel à des acteurs comme Dabba, une association du territoire qui proposent la récupération et le lavage. Nous pouvons nous équiper avec des outils et des prestataires extérieurs qui peuvent apporter leur aide.

Pour le compost, si ce n’est pas déjà le cas pour les gros producteurs de déchets compostables, ça le sera en début 2024, ce qui constituera un gros virage pour les professionnels.

Il y a de très nombreuses façons de réduire les coûts, mutualiser et se renseigner en amont avant que tout le monde ne se jette dessus, car nous avons passé la date légale.

Au niveau des fournisseurs, il y a des acteurs comme PANDA BAG, typique pour les restaurateurs, cela fonctionne bien en la région parisienne et s’installe à Lyon. Ces derniers proposent des caissons lavables et réutilisables entre le fournisseur et le restaurateur. Ces caissons ne sont jamais jetés et cela évite de stocker cagettes, cartons etc… C’est alimentaire, et fonctionne avec le poisson, comme les fruits et légumes etc… Tout est validé en termes d’hygiène, c’est 100% zéro déchet, et économiquement cela revient au même que les emballages jetables.

Un gros point positif qui est souvent sous-estimé : la clientèle, qui est sensibilisée. Beaucoup plus de gens savent pourquoi réduire le gaspillage de toute ressource est urgent. C’est une demande de la clientèle et c’est une plus-value pour le restaurateur. Souvent, ceux qui le font ne le communiquent pas assez, mais il y a des exemples de restaurateurs sur la métropole de Lyon qui sont déjà très engagées dans la démarche et qui ont fait énormément de pas supplémentaires. Ces derniers ont par ailleurs réussi à prouver aux services d’hygiène que l’on peut faire du lavable/réutilisable, et que c’est aussi efficace que du jetable.

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Nous avons la chance sur la métropole d’avoir beaucoup d’acteurs avec des solutions techniques sur le reste du territoire. Nous sommes en colocation avec Rebooteille qui propose le retour de la consigne des bouteilles. Bien que déjà présents dans la restauration, ils vont surtout se concentrer sur le vin, les boissons minérales, ils proposent une gamme de bières, jus de fruits, etc.

ZEro déchet label
  • Connaissez-vous des restaurants zéro déchets ? Quels sont-ils ?

Nous avons fait des défis commerces zéro déchet il y a 1 et 2 ans, et beaucoup de commerces ont participé : restaurateurs, boulangers, etc. Ce sont souvent les restaurateurs qui ont gagné le prix du défi. Ils se mettaient d’accord à l’échelle d’une rue ou d’une association de commerçants sur quels défis ils voulaient réaliser en commun.

Sur le 9ème, nous avons fait il y a 2 ans un défi consistant à réduire le plus possible les emballages client. C’est le restaurant traiteur « Fenotte » qui avait remporté le prix, ils avaient calculé tous leurs déchets et en avaient évité des tonnes en quelques jours. Ces derniers passent par le système de bocaux, qu’ils consignent avec des boites comme des caisses à vin en bois. Tout est stocké dans ces caisses-là, au niveau traiteur, tout est livré et récupéré. Ils font leur propre système de lavage et sont actuellement entrain de changer afin de partir avec le prestataire Dabba afin d’avoir le moins de gestion logistique à faire.

Le Kebab Mayo Ketchup dans la rue Marietton avait été accompagné par l’association CIE (Confiance Impact Ecologique) sur son impact général, que ce soit dans le choix de ses produits, etc.

Il y a également d’autres acteurs en restauration qui se spécialisent dans les couverts, serviettes de table, etc. Cela permet de montrer aux autres commerçants qu’il y a beaucoup de systèmes qui ne demandent pas plus d’organisation, car beaucoup de choses sont déjà lavées sur place : sur le long terme d’un point de vue économique, que ce soit consommation d’eau ou de déchets, de vraies économies sont effectuées même si l’on ne le remarque pas immédiatement.

Une idée reçue à ce sujet est que bien souvent, on pense que tout ce qui est lavable est bien plus couteux en eau que le jetable, mais pas du tout. Les vrais impacts sur les ressources se font à la fabrication de l’objet : le lavage derrière, même si de l’eau est utilisée, représente peu de dépenses de ressources : la consommation d’eau est réduite de deux tiers avec cette solution. C’est bien plus économique et écologique de mettre en place ce système, plutôt que d’utiliser des objets neufs qui ne servent qu’une seule fois, qui consomment énormément d’eau à la fabrication, et que l’on va jeter. On réutilise, et le lavage sur le long terme réduit l’impact de manière significative.

En termes de finances : pas besoin de s’inquiéter sur l’approvisionnement et le stock car on a déjà tout sur place.

Si on, veut vraiment aller au bout de la démarche, je peux vous donner l’exemple des restaurants comme les cantines de quartiers avec qui nous avons fait des ateliers, qui ont cousu leurs propres serviettes de table, avec des tissus récupérables : si l’on veut vraiment aller au bout de la démarche, on peut faire des choses très solidaires et conviviales.

Ce qui est important, c’est ne pas hésiter à communiquer dessus. Il est essentiel de valoriser tout cela. Les clients, les citoyens, y sont de plus en plus sensibles et sont en demande. C’est un des atouts de l’adoption de cette pratique : On répond à des besoins grandissants des citoyens. C’est un vrai argument marketing.

  • Pour finir, avez-vous des projets à venir ou des objectifs spécifiques que vous aimeriez atteindre dans le domaine du zéro déchet dans la restauration ?
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Nous aimerions que la transition par rapport à la loi AGEC au sujet de l’obligation du compost se passe dans les meilleures conditions à partir de l’année prochaine.

La métropole de Lyon va se lancer dans des audits, nous souhaiterions voir le plus de commerces possible qui jouent le jeu sur les contenants, car désormais c’est la loi, et ce n’est pas encore connu. Nous avons envie de voir fleurir plein de demandes, plein de gens qui viennent vers nous pour se lancer, ou qui veulent être mis en avant et que ce ne soit pas forcément nous qui allons vers eux, qu’il y ait plus de personnes proactives.

Nous en voyons de temps en temps d’ailleurs, il y a tout de même un certain nombre de personnes également dans la reconversion professionnelle qui se lancent dans la restauration, et viennent avec une intention écologique, comme des cafés cantines zéro déchet qui utilisent des invendus, des restes alimentaires, ou qui donnent. Dans le quartier Valmy, Un restaurant de la chaine « Le Moulin » a mis en place un frigo solidaire, qu’ils sortent tous les matins et rentrent tous les soirs. Ce dernier est mis à disposition de tout, les commerces comme les gens, qui ont des choses dans leurs frigos qu’ils ne pourront pas consommer, comme par exemple, lors d’un départ en vacances. L’idée, c’est que chacun se serve et donne : il n’y a aucun jugement, c’est de l’anti-gaspillage, c’est solidaire et accessible à tous.

Ce dispositif est aussi super pour les commerces qui n’ont, par exemple, pas envie de se lancer dans des applications comme Too Good To Go, ils n’ont qu’à traverser la rue et peuvent se servir dans le frigo, accessible toute la journée.

Ce sont des initiatives encore peu connues, qui peuvent pourtant être mise en place par beaucoup. Il y a pléthore de petites choses marketing et commerciales qui donnent aussi un côté convivial avec la clientèle. Quelques exemples :

  • Le pâtissier au bout de la rue ; il lui reste des gâteaux à la fin de la semaine : il peut faire appel à ses meilleurs clients.
  • Des cartes de fidélité peuvent être faites lorsque les gens ramènent leurs sacs.
  • Certains font des tote-bags carte de fidélité : c’est à l’effigie du commerce, et ça encourage les gens à ramener le tote-bag plutôt que d’avoir un emballage jetable.

Des choses très chouettes se mettent en place et ne demandent pas grand-chose ; il faut juste avoir l’idée et la volonté. Cela devient de plus en plus nécessaire à plein de niveau, alors autant s’y mettre de sa propre volonté.

Il ne faut pas appréhender, et ne pas hésiter à regarder les sites qui s’occupent des soutiens au niveau des régions, comme l’ADEME, l’agence nationale sur l’environnement qui subventionne également de nombreux projets au sujet du passage à la consigne, et fourni des aides financières,

Il ne faut également pas hésiter à se faire accompagner par des chambres consulaires, comme la CMA avec qui nous travaillons, ou encore la CCI, qui s’est positionnée sur le gaspillage alimentaire. 

Nous avons une page dédiée pour « Mon Commerce Zéro Déchet » avec une foire aux questions si les gens souhaitent en savoir plus. Il ne faut pas hésiter à se rendre sur zerodechetlyon.org, dans l’onglet « Activités & projets », vous pouvez retrouver « Mon Commerce Zéro Déchet, ainsi que toute la cartographie afin de voir les restaurants référencés.

Beaucoup d’actions peuvent être menées : Vous pouvez par exemple venir ver l’association et vous engager à accepter les contenants. Beaucoup de documentation vous est fourni chez Objectif Zéro Déchet si vous souhaitez aller plus loin.

Concernant:

Biodéchets:

Sur la Métropole de Lyon il y a plusieurs prestataires dont (liste non exhaustive) : Terrestris, les AlchimistesOuicompost etc.

Mon commerce zéro déchet:

Vous en souhaitant une bonne lecture !

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