Les pratiques commerciales trompeuses
Qu’est ce qu’une pratique commerciale ?
La notion de “pratique commerciale” est plus large que la notion de publicité.
Elle n’est pas définie dans le code de la consommation mais la directive communautaire du 11 mai 2005 en donne la définition suivante : «toute action, omission, conduite, démarche ou communication commerciale, y compris la publicité et le marketing, de la part d’un professionnel, en relation directe avec la promotion, la vente ou la fourniture d’un produit au consommateur».
Les pratiques commerciales déloyales
L’article L. 120-1 du Code de la consommation pose un principe général d’interdiction des pratiques commerciales déloyales.
Une pratique commerciale est déloyale lorsqu’elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu’elle altère, ou est susceptible d’altérer de manière substantielle, le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l’égard d’un bien ou d’un service.
Le caractère déloyal d’une pratique commerciale visant une catégorie particulière de consommateurs ou un groupe de consommateurs vulnérables en raison d’une infirmité mentale ou physique, de leur âge ou de leur crédulité s’apprécie au regard de la capacité moyenne de discernement de la catégorie ou du groupe.
Parmi les pratiques commerciales déloyales on compte notamment les pratiques commerciales trompeuses et les pratiques commerciales agressives.
Les pratiques commerciales trompeuses
La loi distingue deux sortes de pratiques commerciales trompeuses : les actions trompeuses et les omissions trompeuses. Dans les deux cas, le consommateur est incité à prendre une décision d’achat qu’il n’aurait pas prise en d’autres circonstances.
Les actions trompeuses
Il s’agit des pratiques commerciales qui contiennent ou véhiculent :
· des éléments faux susceptibles d’induire en erreur le consommateur moyen
· ou bien des éléments vrais mais présentés de telle façon qu’ils conduisent au même résultat.
Le Code précise qu’une pratique commerciale est trompeuse si elle est commise dans l’une des circonstances suivantes :
1° Lorsqu’elle crée une confusion avec un autre bien ou service, une marque, un nom commercial, ou un autre signe distinctif d’un concurrent ;
2° lorsqu’elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur l’un ou plusieurs des éléments suivants :
- l’existence, la disponibilité ou la nature du bien ou du service ;
- les caractéristiques essentielles du bien ou du service, à savoir : ses qualités substantielles, sa composition, ses accessoires, son origine, sa quantité, son mode et sa date de fabrication, les conditions de son utilisation et son aptitude à l’usage, ses propriétés et les résultats attendus de son utilisation, ainsi que les résultats et les principales caractéristiques des tests et contrôles effectués sur le bien ou le service ;
- le prix ou le mode de calcul du prix, le caractère promotionnel du prix et les conditions de vente, de paiement et de livraison du bien ou du service ;
- le service après-vente, la nécessité d’un service, d’une pièce détachée, d’un remplacement ou d’une réparation ;
- la portée des engagements de l’annonceur, la nature, le procédé ou le motif de la vente ou de la prestation de services ;
- l’identité, les qualités, les aptitudes et les droits du professionnel ;
- le traitement des réclamations et les droits du consommateur ;
- lorsque la personne pour le compte de laquelle elle est mise en œuvre n’est pas clairement identifiable.
Exemples de pratiques trompeuses
Les pratiques ne sont condamnables que si elles portent sur un ou plusieurs des éléments énumérés à l’article L. 121-1. La liste bien que limitative couvre toutes les situations :
- existence : produits présentés dans un prospectus à un prix attractif pendant une période d’une semaine et qui sont rapidement indisponibles à la vente ;
- nature : proposition d’un crédit gratuit alors que le consommateur se trouve engagé dans un crédit permanent ;
- composition : montre en or pour du plaqué, pâtisseries annoncées au beurre alors qu’elles n’en contiennent pas, meuble en chêne massif alors qu’il s’agit de plaqué bois, du cuir pleine fleur pour un canapé en croûte de cuir, etc. ;
- qualités substantielles : poulet élevé en plein air comme autrefois alors qu’il a été élevé de manière industrielle, du vrai pain de boulanger alors que le point de vente n’est qu’un terminal de cuisson, produits biologiques qui n’en sont pas ;
- propriétés, résultats attendus de l’utilisation : sont ici visées les annonces qui attribuent à certains des éléments entrant dans la composition des produits une fonction utilitaire comme dans les produits de régime, de bien-être, etc. Promesses faites par exemple pour certains produits de traitement (insecticides, décapants, etc.) ;
- espèce : bulbes de tulipes d’une variété différente de celle représentée en photo sur l’emballage ;
- origine : faire passer du vin de table pour un vin prestigieux, qualifier de « Limoges » de la porcelaine fabriquée à l’étranger, faire croire à l’origine française d’un produit fabriqué à l’étranger ;
- quantité : boite de conserves annoncée comme pesant 500 g alors qu’il manque 100 g ;
- mode et date de fabrication : fabrication à l’ancienne, cuit au feu de bois, pâtisserie fraîche du jour alors qu’elle est préparée depuis plusieurs jours, CD vendus avec la mention « stéréo » alors qu’ils ont été enregistrés en mono et traités artificiellement pour être entendus par deux haut-parleurs ;
- prix : indication d’un prix spécial alors qu’il s’agit du prix habituellement pratiqué, prix de gros alors que le prix pratiqué est un prix de détail, prix indiqué dans la publicité qui ne correspond pas au produit dessiné ou à la photo illustrant la publicité, les annonces de réduction de prix calculées sur des prix qui ne sont jamais pratiqués, prix coûtant qui n’intègre pas certaines remises consenties par le fournisseur ou le fabricant, prix tout compris qui n’en est pas un…
- conditions de vente : indication de la mention « satisfait ou remboursé » alors que l’annonceur soumet cette possibilité à des conditions non indiquées dans l’annonce, promesses de cadeaux exceptionnels pour tout visiteur qui ne sont en fait que des gadgets sans valeur ou qui ne sont remis qu’aux acheteurs ;
- conditions de leur utilisation : produit annoncé comme simple d’emploi alors que ce n’est pas le cas, par exemple appareil de chauffage permettant de chauffer tant de m2 en oubliant de préciser que pour arriver à de tels résultats, il faut une isolation parfaite ;
- motifs ou procédés de la vente ou de la prestation de services : ventes après saisie en douanes, ventes directes, opérations de liquidation volontaires annoncées comme une contrainte de droit et revêtant un caractère d’urgence, faire croire à la détention obligatoire d’un appareil, comme un extincteur, pour en suggérer fortement l’achat ;
- portée des engagements pris par l’annonceur : l’annonceur intervient personnellement pour prendre des engagements qu’il ne tiendra pas, par exemple « Dans 10 ans, je vous rembourserai votre cuisine au prix où vous l’avez payée » ;
- identité, qualités ou aptitudes du professionnel : faire état de qualité de propriétaire-récoltant sur l’étiquette d’un vin alors que cela est faux, faire état de diplômes ou de références professionnelles non possédés, etc.
Les omissions trompeuses
L’omission d’une information peut également induire le consommateur en erreur.
Le code définit comme trompeuse la pratique commerciale qui omet, dissimule ou fournit de façon inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information substantielle ou lorsqu’elle n’indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte.
Il faut tenir compte des limites propres au moyen de communication utilisé et des circonstances qui l’entourent : une proposition adressée par sms n’est pas de même nature qu’une page de publicité dans un magazine.
Dans toute communication commerciale constituant une invitation à l’achat et destinée au consommateur mentionnant le prix et les caractéristiques du bien ou du service proposé, sont considérées comme substantielles les informations suivantes :
- les caractéristiques principales du bien ou du service ;
- l’adresse et l’identité du professionnel ;
- le prix toutes taxes comprises et les frais de livraison à la charge du consommateur, ou leur mode de calcul, s’ils ne peuvent être établis à l’avance ;
- les modalités de paiement, de livraison, d’exécution et de traitement des réclamations des consommateurs, dès lors qu’elles sont différentes de celles habituellement pratiquées dans le domaine d’activité professionnelle concerné ;
L’existence d’un droit de rétractation, si ce dernier est prévu par la loi.
Si l’une ou l’autre de ces indications manque dans l’information commerciale destinée au consommateur comportant le prix et les caractéristiques du bien ou du service proposé, on se trouve en présence d’une omission qui peut induire en erreur le consommateur.
À noter que le délit d’omission trompeuse concerne les relations entre un professionnel et un consommateur. Il ne s’applique pas aux relations des professionnels entre eux.
La mise en œuvre de l’article L 121-1
Le champ d’application
Sont visées les pratiques mises en œuvre ou qui produisent leurs effets en France, ce qui permet d’appliquer le texte à des pratiques provenant de l’étranger.
Seules les pratiques mises en œuvre par les professionnels sont condamnables. Des messages trompeurs diffusés par voie de petites annonces par des particuliers ne sont pas visés par le texte.
Sont protégés en priorité les consommateurs mais le texte étend la protection aux professionnels pour les actions trompeuses.
Les destinataires du message
Il faut se référer aux conditions fixées par l’article L 120-1. La pratique n’est condamnable que s’il existe un risque d’interprétation fausse de la part de la personne qui reçoit le message :
- face à une pratique mise en œuvre à l’égard d’un large public, l’appréciation se fait au regard de la psychologie duconsommateur moyen : il faut que la pratique altère, ou soit susceptible d’altérer de manière substantielle, le comportement économique du consommateur moyen. Il est défini comme le consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé.
Si avec un minimum d’attention, le consommateur peut déceler ce qui est trompeur, il n’y a pas infraction. Le délit n’est pas constitué lorsque le simple bon sens écarte toute équivoque. - quand la pratique est destinée à un public déterminé, ils convient d’apprécier au cas par cas. Notamment lorsqu’il s’agit d’une catégorie particulière de consommateurs ou un groupe de consommateurs vulnérables en raison d’une infirmité mentale ou physique, de leur âge ou de leur crédulité, l’analyse se fait au regard de la capacité moyenne de discernement de la catégorie ou du groupe.
Il n’est pas nécessaire d’apporter la preuve qu’un consommateur a été effectivement trompé ou dupé. Il suffit que la pratique soit de nature à tromper.
Le responsable de la pratique
Les personnes punissables sont les professionnels qui mettent en œuvre une pratique contraire aux exigences de la diligence professionnelle définie dans la directive comme » le niveau de compétence spécialisé et de soins dont le professionnel est raisonnablement censé faire preuve conformément aux pratiques de marché honnêtes et/ ou au principe de bonne foi ».
L’élément moral du délit peut se déduire de la négligence du professionnel qui par exemple s’est abstenu de vérifier la véracité d’un message publicitaire.
Une fois la publicité diffusée, la publication d’informations rétablissant la réalité ou les précisions apportées par le vendeur sont sans effet sur l’existence de l’infraction. Il s’agit d’un délit instantané.
La liste des pratiques commerciales réputées trompeuses
Une liste de 22 pratiques commerciales déloyales trompeuses a été établie au niveau européen et transposée en droit français.
Ces pratiques, réputées trompeuses en toutes circonstances, sont celles qui ont pour objet :
1 – |
pour un professionnel, de se prétendre signataire d’un code de conduite alors qu’il ne l’est pas ; |
2 – |
d’afficher un certificat, un label de qualité ou un équivalent sans avoir obtenu l’autorisation nécessaire ; |
3 – |
d’affirmer qu’un code de conduite a reçu l’approbation d’un organisme public ou privé alors que ce n’est pas le cas ; |
4 – |
d’affirmer qu’un professionnel, y compris à travers ses pratiques commerciales, ou qu’un produit ou service a été agréé, approuvé ou autorisé par un organisme public ou privé alors que ce n’est pas le cas, ou de ne pas respecter les conditions de l’agrément, de l’approbation ou de l’autorisation reçue ; |
5 – |
de proposer l’achat de produits ou la fourniture de services à un prix indiqué sans révéler les raisons plausibles que pourrait avoir le professionnel de penser qu’il ne pourra fournir lui-même, ou faire fournir par un autre professionnel, les produits ou services en question ou des produits ou services équivalents au prix indiqué, pendant une période et dans des quantités qui soient raisonnables compte tenu du produit ou du service, de l’ampleur de la publicité faite pour le produit ou le service et du prix proposé ; |
6 – |
de proposer l’achat de produits ou la fourniture de services à un prix indiqué, et ensuite : a) de refuser de présenter aux consommateurs l’article ayant fait l’objet de la publicité ; b) ou de refuser de prendre des commandes concernant ces produits ou ces services ou de les livrer ou de les fournir dans un délai raisonnable ; c) ou d’en présenter un échantillon défectueux, dans le but de faire la promotion d’un produit ou d’un service différent ; |
7 – |
de déclarer faussement qu’un produit ou un service ne sera disponible que pendant une période très limitée ou qu’il ne sera disponible que sous des conditions particulières pendant une période très limitée afin d’obtenir une décision immédiate et priver les consommateurs d’une possibilité ou d’un délai suffisant pour opérer un choix en connaissance de cause ; |
8 – |
de s’engager à fournir un service après-vente aux consommateurs avec lesquels le professionnel a communiqué avant la transaction dans une langue qui n’est pas une langue officielle de l’État membre de l’Union européenne dans lequel il est établi et, ensuite, assurer ce service uniquement dans une autre langue sans clairement en informer le consommateur avant que celui-ci ne s’engage dans la transaction ; |
9 – |
de déclarer ou de donner l’impression que la vente d’un produit ou la fourniture d’un service est licite alors qu’elle ne l’est pas ; |
10- |
de présenter les droits conférés au consommateur par la loi comme constituant une caractéristique propre à la proposition faite par le professionnel ; |
11- |
d’utiliser dans les médias un contenu rédactionnel, financé par le professionnel lui-même, pour faire la promotion d’un produit ou d’un service, sans l’indiquer clairement dans le contenu ou à l’aide d’images ou de sons clairement identifiables par le consommateur ; |
12- |
de formuler des affirmations matériellement inexactes en ce qui concerne la nature et l’ampleur des risques auxquels s’expose le consommateur sur le plan de sa sécurité personnelle ou de celle de sa famille s’il n’achète pas le produit ou le service ; |
13- |
de promouvoir un produit ou un service similaire à celui d’un autre fournisseur clairement identifié, de manière à inciter délibérément le consommateur à penser que le produit ou le service provient de ce fournisseur alors que tel n’est pas le cas ; |
14- |
de déclarer que le professionnel est sur le point de cesser ses activités ou de les établir ailleurs alors que tel n’est pas le cas ; |
15- |
d’affirmer d’un produit ou d’un service qu’il augmente les chances de gagner aux jeux de hasard ; |
16- |
d’affirmer faussement qu’un produit ou une prestation de services est de nature à guérir des maladies, des dysfonctionnements ou des malformations ; |
17- |
de communiquer des informations matériellement inexactes sur les conditions de marché ou sur les possibilités de trouver un produit ou un service, dans le but d’inciter le consommateur à acquérir celui-ci à des conditions moins favorables que les conditions normales de marché ; |
18- |
d’affirmer, dans le cadre d’une pratique commerciale, qu’un concours est organisé ou qu’un prix peut être gagné sans attribuer les prix décrits ou un équivalent raisonnable ; |
19- |
de décrire un produit ou un service comme étant « gratuit”, « à titre gracieux”, « sans frais” ou autres termes similaires si le consommateur doit payer quoi que ce soit d’autre que les coûts inévitables liés à la réponse à la pratique commerciale et au fait de prendre possession ou livraison de l’article ; |
20- |
d’inclure dans un support publicitaire une facture ou un document similaire demandant paiement qui donne au consommateur l’impression qu’il a déjà commandé le produit ou le service commercialisé alors que tel n’est pas le cas ; |
21- |
de faussement affirmer ou donner l’impression que le professionnel n’agit pas à des fins qui entrent dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale, ou se présenter faussement comme un consommateur ; |
22- |
de créer faussement l’impression que le service après-vente en rapport avec un produit ou un service est disponible dans un État membre de l’Union européenne autre que celui dans lequel le produit ou le service est vendu |
Cette liste est également applicable aux pratiques entre professionnels.
Constatation des infractions
Les agents de la DGCCRF sont habilités à rechercher et à constater les infractions.
Cessation de la pratique commerciale trompeuse :
- elle peut être ordonnée par un agent habilité, soit par un juge d’instruction ou par le tribunal saisi des poursuites.
Sanctions pénales
Peines principales :
- Emprisonnement de 2 ans et amende de 300.000 euros.
Le montant de l’amende peut être porté, de manière proportionnée aux avantages tirés du manquement, à 10 % du chiffre d’affaires moyen annuel, calculé sur les trois derniers chiffres d’affaires annuels connus à la date des faits, ou à 50 % des dépenses engagées pour la réalisation de la publicité ou de la pratique constituant le délit.
Peines complémentaires :
Les personnes physiques encourent également à titre de peines complémentaires l’interdiction d’exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d’administrer, de gérer ou de contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour leur propre compte ou pour le compte d’autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale, pour une durée de cinq ans au plus.
Les personnes morales déclarées responsables pénalement encourent une amende de 1.500.000 euros ainsi que les peines complémentaires prévues aux 2° à 9° de l’article 131-39 du code pénal.
En cas de condamnation, le tribunal peut ordonner l’affichage ou la diffusion de la décision.
Il peut, de plus, ordonner la diffusion, aux frais du condamné, d’une ou de plusieurs annonces rectificatives.
Les éléments ci-dessus sont donnés à titre d’information. Ils ne sont pas forcément exhaustifs et ne sauraient se substituer à la réglementation applicable.
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